Nyima vient de commencer sa première thanka. C’est la récompense de six mois d’apprentissage.

Nyima étudie la peinture sacrée à la Tsering Art School, au monastère Scheshen, celui de Dilgo Khyentsé Rinpoche, dirigé à présent par son petit fils, Scheshen Rabjam Rinpoche . C’est là que réside aussi Mathieu Ricard.

Cette école est réputée car son Maître, Konchok, est issu d’une très pure et ancienne lignée, c’est le même principe que pour les pratiques. Tous les matins, les élèves tracent des motifs à la pointe sèche sur un planche enduite d’une poudre, selon la technique traditionnelle tibétaine. Ils effacent et recommencent tant que le professeur n’est pas satisfait. L’après-midi, ils apprennent à travailler les couleurs.

Car au début, les étudiants doivent apprendre à tracer et à peindre les éléments qui composent une thanka : le décors, les fleurs, l’eau, les montagnes, mais aussi les signes auspicieux, le trône de lotus... Puis ils apprennent à tracer le visage du Bouddha, puis son corps et enfin ses vêtements. Lorsqu’ils ont appris tout cela, on leur donne le droit de faire leur première thanka, de Bouddha bien sūr. Mais bien qu’ils aient tous appris la même chose, aucune thanka ne ressemble à une autre. Les étudiants jouissent de suffisamment d’autonomie pour organiser « la mise en scène » de leur sujet, tout en respectant les codes précis concernant les attitudes, les accessoires et le visage des déités.

Donc le temps est venu pour Nyima et son copain Sonam, de commencer leur première thanka. Ils en sont tout émus et assez inquiets.

D’abord, ils sont allés acheter le calicot nécessaire, puis ils ont confectionné un cadre en bois sur lequel ils ont tendu le tissu à l’aide d’une ficelle passée dans des trous. Ils ont trouvé ça assez difficile, et ont du se faire aider par les plus anciens. Ensuite ils ont passé un enduit sur la toile afin de l’apprêter et de la rendre ainsi imperméable.

Puis, élément indispensable, ils ont du consulter le calendrier pour savoir quel était le jour le plus favorable pour commencer.

Enfin, il est d’usage, lorsqu’on commence une thanka, d’offrir une collation à toute l’école. Nous allons donc préparer ce cérémonial. Si Nyima travaille bien, il devrait finir sa thanka d’ici deux mois, tout en continuant à apprendre à tracer et à peindre les autres déités et des éléments de plus en plus difficiles, et ainsi, d’année en année, pendant six ans, au terme desquels il recevra un certificat qui fera de lui un peintre de thanka professionnel diplômé.

Pour ceux qui connaissent et apprécient les thankas de Lerab Ling, je précise qu’elles sont de la même lignée dont est issue l’école dans laquelle étudie Nyima.